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Des parasites génétiques impliqués dans le développement et la fonction du système immunitaire?

Publié le 4 septembre 2024

Une récente étude réalisée par l’équipe de Claude Perreault, directeur de l’Unité de recherche en immunobiologie de l’IRIC, propose trois fonctions potentielles pour des séquences d’ADN dites « parasites » dans le développement des lymphocytes T. Mené par le doctorant Jean-David Larouche, le travail fait l’objet d’une publication dans le journal eLife.

 

Une forte présence dans des cellules requises pour l’établissement de la tolérance au soi

Les lymphocytes T sont des cellules immunitaires impliquées dans l’élimination des cellules infectées et des cellules cancéreuses. « T » pour l’organe dans lequel ils complètent leur développement : le thymus. C’est à cet endroit qu’ils apprennent à tolérer les cellules normales du corps (c’est-à-dire le soi) et à détecter les envahisseurs comme les agents infectieux ou alors les cellules cancéreuses (le non-soi).

De façon intéressante, des fragments d’ADN appelés éléments transposables sont exprimés à des niveaux plus élevés dans certaines cellules du thymus que dans le reste du corps. Qualifiés de parasites génétiques, les éléments transposables sont des vestiges d’infections virales qui représentent environ 45% du génome humain. Le fait que leur activité soit élevée dans le thymus soulève une question importante : les éléments transposables sont-ils impliqués dans le développement des lymphocytes T?

Pour répondre à cette question, le groupe du laboratoire Perreault a réalisé des analyses multi-omiques, c’est-à-dire un ensemble de techniques permettant d’analyser plusieurs milliers d’indicateurs simultanément et d’en dégager une vue d’ensemble, dans des cellules thymiques humaines et murines. Les données obtenues révèlent que l’expression des éléments transposables dans le thymus humain varie d’un type cellulaire à l’autre de même qu’au cours du développement. Deux types de cellules expriment particulièrement fortement les éléments transposables : les cellules épithéliales thymiques de la médulla (mTECs) et les cellules dendritiques plasmacytoïdes (pDCs). Ces deux populations cellulaires sont essentielles à l’établissement de la tolérance au soi chez les lymphocytes T.

 

Des fonctions multiples pour le système immunitaire?

L’équipe a identifié trois fonctions potentielles des éléments transposables dans le thymus. D’abord, en liant de nombreux facteurs de transcription, ils contribuent à différents réseaux de régulation génique. Ensuite, en stimulant la sécrétion de certaines molécules, ils induisent un microenvironnement propice au développement des lymphocytes T. Enfin, en présentant certains fragments de molécules à leur surface, ils contribuent à l’éducation des lymphocytes T. Les éléments transposables pourraient donc jouer plusieurs rôles dans le développement et la fonction du système immunitaire.

Les résultats obtenus suggèrent que l’expression des éléments transposables dans les cellules du thymus est critique pour prévenir des réactions auto-immunes chez les vertébrés. Par ces nouvelles connaissances, le développement d’immunothérapies efficaces et sécuritaires ciblant les éléments transposables, exprimés fortement dans les tumeurs, pourrait être facilité.

 

Étude citée

Larouche J-D, Laumont, CM, Trofimov A, Vincent K, Hesnard L, Brochu S, Côté C, Humeau JF, Bonneil É, Lanoix K, Durette C, Gendron P, Laverdure J-P, Richie ER, Lemieux S, Thibault P, Perreault C (2024) Transposable elements regulate thymus development and function, eLife 12:RP91037. https://doi.org/10.7554/eLife.91037.3