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Une percée importante dans la compréhension du mode d’action d’agents anticancéreux

Publié le 1er juillet 2013

Des chercheurs de l’IRIC expliquent pourquoi une classe de molécules anti-tumeurs n’a que des effets limités.

Une équipe de recherche de l’IRIC, dirigée par le Dr Marc Therrien, et ses collègues de l’Institut de recherche Samuel Lunenfeld à l’hôpital Mont Sinaï de Toronto, ont récemment élucidé le mécanisme moléculaire limitant l’action d’inhibiteurs d’une enzyme appelée RAF qui est impliquée dans de nombreux cancers. Leur importante étude, vient de faire la page couverture de la prestigieuse revue scientifique Nature Chemical Biology.
L’enzyme RAF contrôle la prolifération et la survie des cellules. Normalement, l’enzyme est activée seulement lorsque deux protéines RAF s’associent pour former un couple (ou dimère) suite à la réception d’un signal provenant de l’extérieur de la cellule. Cependant, dans bon nombre de tumeurs les dimères de RAF se forment spontanément, indépendamment de signaux externes, conduisant ainsi à la prolifération et à la survie incontrôlée des cellules cancéreuses.

Pour contrer la croissance des tumeurs, les compagnies pharmaceutiques ont investi des efforts considérables dans le développement de molécules qui inhibent l’activité enzymatique de RAF. Quoique certains succès cliniques aient été observés, il s’avère que dans l’ensemble, la prise de ces inhibiteurs tend à stimuler l’activité enzymatique de RAF dans les cellules cancéreuses plutôt que de la réduire; un paradoxe qui donne bien des maux de tête à toute une communauté de chercheurs et de cliniciens. Des études récentes, suggèrent que ces inhibiteurs ont tendance à induire la formation de dimères et, lorsque les dimères contiennent une protéine RAF non liée à un inhibiteur, celle-ci est activée par son partenaire inactif lié au composé. Ce phénomène stimule la prolifération et la survie des cellules cancéreuses, contrecarrant les effets souhaités du médicament.
Pourquoi les inhibiteurs de RAF ont-ils cet effet ? Pour étudier plus en détail ce phénomène, l’équipe du Dr Therrien a adapté une technologie initialement mise au point par le Dr Michel Bouvier de l’IRIC et a développé des biosenseurs permettant de mesurer directement la formation de dimères de RAF dans les cellules vivantes. Ces outils ont permis de confirmer que plusieurs inhibiteurs pharmacologiques de RAF induisent la formation de dimères en proportion de la dose utilisée. De concert avec l’équipe du Dr Frank Sicheri de Toronto, l’équipe du Dr Therrien a aussi cherché à comprendre l’impact qu’ont ces molécules sur la structure tridimensionnelle de RAF. Ils ont découvert que les inhibiteurs de RAF bloquent la protéine dans une conformation «fermée» qui ressemble en tout point à une forme active et que cette conformation provoque la dimérisation avec une autre protéine RAF non liée à l’inhibiteur la forçant à son tour à adopter une conformation active.
La compréhension de ce mécanisme est une première étape dans le développement de nouveau médicaments anticancéreux. Les chimistes médicinaux peuvent maintenant retourner à leur table à dessin pour  produire des inhibiteurs capables de surmonter cette complication.

Étude citée :
Lavoie H, Thevakumaran N, Gavory G, Li J, Padeganesh A, Guiral S, Duchaine J, Mao DYL, Bouvier M, Sicheri F, Therrien M. Inhibitors that stabilize a closed RAF kinase domain conformation induce dimerization Nature Chemical Biology